Quelques éléments factuels :
Notre quotidien le plus banal est assiégé par le rappel du risque.
Sur la route : Un radar peut vous flasher à tout moment, surveillez votre vitesse ; cette intersection n'est pas protégée par un feu / stop / cédez le passage ; la chaussée est artificiellement rétrécie par un muret => permet de créer une rentrée d'argent dans les caisses de l'état sous forme d'amendes ou d'économies d'infrastructure (feux tricolores, ronds-point) ou de créer une pseudo-sentiment de sécurité chez les riverains d'une voie réputée dangereuse (au mépris de la sécurité des usagers de la voie) ; couvre secondairement l'argumentaire des constructeurs pour des voitures toujours plus équipées en dispositifs supposément sécurisants d'aide à la conduite voire même de remplacement du pilote humain.
En ville : Pour votre sécurité, vous êtes filmé => permet d'habituer une population à une surveillance généralisée de masse ; permet aussi de collecter des données sur l'ensemble des mouvements de population (qui fait quoi, où, quand et à quelle fréquence)
Informatique connectée : Prenez un anti-virus pour ne pas risquer d'être infecté (lors-même que les logiciels intègrent souvent intentionnellement les portes dérobées qui sont utilisées) => permet de vendre des antivirus et, plus généralement, maintient une climat anxiogène autour des outils numériques, qui pourraient devenir gênants et qu'il faudrait pouvoir juguler quand on le souhaite
Maintien de l'ordre : Si vous défilez, vous risquez un œil / une main... pour votre sécurité ne venez pas aux manifs. => permet de dissuader la dissidence de toute velléité de manifester son désaccord publiquement et de manière coordonnée
Démocratie "représentative" : Vous risquez de laisser le pouvoir à Marine Le Pen si vous ne votez pas Chirac/Sarkozy/Hollande/Macron => permet de forcer les votes pour un candidat désigné, même sans adhésion au programme dudit candidat (qui se réclame ensuite du suffrage universel pour imposer - par la force, le cas échéant - les plus traîtrises les plus féroces de l'histoire politique récente)
Implications :
- La multiplication des discours sécuritaires crée paradoxalement un climat général d'insécurité permanente et, si l'on considère que des personnes qui craignent pour leur sécurité ne souhaitent rien tant qu'on la leur garantisse à son maximum, elle permet - sous couvert d'améliorer cet état d'insécurité relative - de faire passer n'importe quelle mesure "pour notre bien".
- La sécurité est devenue un argument de vente systématique, il n'est pas contrable.
- Les citoyens ordinaires n'en finissent plus d'en redemander : nous avons développé une addiction à la sécurité (systèmes d'alarme domestiques en progression constante, 6 airbags dans une 206 (!))
- Génère à l'égard de ses pairs une attitude a priori méfiante : le voisin est forcément animé de plus ou moins mauvaises intentions.
- Cette situation laisse également plus de poids à l'usage du terrorisme : dans une société aussi préoccupée par sa sécurité, agir en choquant l'opinion par la preuve que l'insécurité est omniprésente et particulièrement violente devient un levier puissant et facile à employer.
S'agit-il d'un système, d'une méthode qui se généralise ? Est-ce le résultat d'une évolution "dans le confort" de nos sociétés économiquement développées ?