Dans un débat pseudo-intello : les éoliennes, en couvrant l'horizon, sont une horreur qui nivelle le paysage et annihile sa singularité...
Pas faux, mais si ce n'est pas très beau, ce n'est pas laid non plus à mon goût, je trouve même ça plutôt apaisant.
Passons sur le rapport sous-tendu à notre mode de vie dans les décennies à venir, et leur apport au mix énergétique.
La réflexion qui me traverse concerne les éléments humains du paysage, en général : lesquels sont beaux, lesquels sont laids, et est-ce un élément utile et suffisant dans le débat sur leur construction ? On a construit en béton, parce que c'était nécessaire, rapide, peu coûteux, efficace. Puis on a détesté ces zones bétonnées, on a protégé les espaces autour, puis on regrette à présent de ne pas pouvoir protéger ce patrimoine, ni faire évoluer ces zones...
L'horizon piqué de clochers, les rivières détournées de biefs, les usines proto-industrielles, les hauts fourneaux, tout cela a été perturbant, un jour, laid, édifiant, neuf, clinquant, prétentieux.
Je ne dis pas que c'est le temps qui nous a lassé,cassé le goût, habitué à la laideur ; je dis, comme W. Benjamin, que les objets acquièrent une aura, une patine qui les fait tranquillement glisser de ce statut d'objet à celui de sujet, soit par un processus "magique" qui leur est propre, essentiel, soit parce que nous développons progressivement, vis à vis d'eux, un affect, une émotion, une empathie.
Nous adorons aujourd'hui les friches, même les plus repoussantes : Tchernobyl est un personnage de notre histoire.
Un jour nous aimerons nos éoliennes.